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LA FEMME HORA DU MOIS / L’INTERVIEW

par horamagazine

Hora a le privilège d’être ici aujourd’hui afin d’interviewé

Une femme courage qui combat en silence une maladie peu connue 

L’ENDOMETRIOSE

Madame Assia Belhocine

Présidente de Association Nationale Algérienne de Lutte Contre l'Endométriose / ENDO-ALGERIE 

Mme Assia BELHOCINE

Bonsoir 

1—Parlez-nous de votre personne ? 

BELHOCINE Assia ; âgée de 47 ans ; mariée depuis 18 ans ; ma fille qui s’appelle AIDA et dont le prénom résume intimement mon existence qui est presque comme un peu théâtrale. A 23 ans j’obtiens mon diplôme en droit suivi d’un certificat d’aptitude à la profession d’avocat (mon rêve étant de devenir avocate croyant de façon puérile pouvoir rendre toutes les justices au monde). Il était pour moi ; à ce moment-là impensable que je puisse m’accorder une halte ; J’ai donc rejoint le monde professionnel à peine deux mois après l’obtention de mes diplômes. Ayant cumulé plus de 20 ans de carrière ; partagées entre le métier d’avocat (exercé que durant 2 ans) ensuite l’entreprise ou j’ai eu à me frotter à la gestion de la ressource humaine ; le recrutement et le conseil en entreprise sur les aspects RH ; une filière professionnelle qui m’a passionnée ; dans la mesure ou la communication ; la formation ; le développement ; le placement ; ont toujours été des sujets qui ont su titiller mon envie d’approfondir non seulement mes compétences mais aussi mon rapport avec l’humain et donc avec la vie. 

Très jeune ; je me voyais déjà animée par une force de militantisme dans tout ; par exemple pour les activités sportives du quartier ; lorsque j’avais 16 ans j’étais celle qui tentait de regrouper les amis du quartier pour disputer un match de volley chaque week-end ; lorsque j’avais rejoint la fac ; j’ai tenté aussi de créer un petit groupe au sein de la faculté pour initiation à temps perdu à la lecture ou l’écriture;   c’était difficile de réaliser tout çà lorsque je me rendais compte peu à peu ; que le seul loisir capable de faire plaisir à un jeune c’était d’aller danser en boîte ou de se retrouver dans l’un des restaus les plus huppés d’Alger à bavarder d’idéaux d’une jeunesse que je voyais déjà diluée dans désillusion totale .  Lorsque j’ai rejoint le monde professionnel ; j’avais fait part à certains de mes proches amis le projet de créer une association qui aurait eu pour objectif d’accompagner les personnes âgées qui se retrouvaient seuls chez soi : par exemple en leur offrant des prestations simples qui seraient en mesure d’égayer un peur leur vie : promenade ; lecture ; peinture ……mais vite ; je me suis rendue compte que mes aspirations relevaient de l’utopie ; car je découvrais peu à peu que l’humain n’était pas trop versé pour se rapprocher de cet autre qui se retrouve démuni de certaines choses élémentaires de la vie.

Durant ce temps ; j’ai consacré ma vie à travailler de façon linéaire sans relâche ; pensant que le plus important dans une vie c’était de gravir les échelons en assurant la mise en place d’une retraite qui me permettrait de finir mes jours en toute sécurité, jusqu’à ce que mes 40 ans pointent du nez pour faire chavirer mon navire vers de nouvelles perspectives à l’antipode de celles que j’avais entreprises et nourries pendant de très longues années.

 

2—Quels étaient les premiers symptômes par rapport à cette maladie qui vous a épuisé mentalement et physiquement ?

J’avais vécu ma toute première douleur lors de mes premières menstruations ; autrement dit à quatorze ans ; et je me souvenais que ma mère avait organisé ce jour-là un café familial pour mon obtention de mon diplôme de brevet ; et je l’avais beaucoup perturbé avec mes incessantes plaintes en rapport avec ses soudaines insupportables douleurs ;   je me retrouvais ; par un jour qui était censé être joyeux ;  paralysée par des douleurs inextricables et qui m’avaient je me souviens tenue prisonnière dans mon lit jusqu’au lendemain . A l’époque on me disait déjà que c’était tout à fait normal d’en souffrir autant ; et qu’avec le temps ça allait finir par disparaitre mais ce ne fut jamais le cas ; puisque les douleurs au fil du temps prenaient des proportions plus qu’inquiétantes. 

 

 3—Vous avez pris une décision radicale en quittant le monde professionnel pour vous réfugier dans votre passion qu’est celui de l’art de la peinture ; parlez-nous de cette reconversion thérapeutique comme vous le soulignez ?

Après vingt ans de carrière ; et surtout d’interminables douleurs physiques dues à ma maladie ; qui m’ont persécuté durant de très longues années sans répit ; il y avait cette petite voix au fond de moi qui me taraudait à tout bout de champs et qui me disait tout bas qu’il était temps pour moi de mettre les voiles vers d’autres horizons ; des horizons plus sereins et plus à l’coute de mon être. Le monde professionnel m’a fait découvrir petit à petit les multiples facettes de l’humain ; et donc la réalité du monde ; j’en ai été forgée de tout point de vue ; mais au bout de vingt ans je pense que l’on possède assez de recul pour savoir si on se trouve au bon endroit ou pas ; mais surtout est ce que les choix effectués ont été les bons ou pas. La peinture ; le dessin ; l’écriture et la lecture sont pour moi une thérapie indissociable de mon bien être de. En parallèle de ce que j’assumais comme responsabilités professionnelles ; j’arrivais à maintenir en vie discrètement et secrètement ces petits plaisirs. Les dernières années de mon parcours professionnel ; juste avant la pandémie d’une année à peu près ; j’avais décidé férocement de quitter ma zone de confort et de plonger dans cet océan d’aventures pour une rencontre avec ce MOI que j’avais perdu de vue sous l’emprise de paradigmes qui finalement n’étaient forcément ce qui me convenait. Après une année de cogitation et de réflexion ; j’ai repris sans hésitations contact avec mes toiles ; mes pinceaux et le galet pour donner naissance à une belle histoire artistique qui m’a offert que du beau. Aujourd’hui je peins sur du galet que j’encadre et grâce auquel je décore les espaces intérieurs des gens avec une inépuisable passion. C’est devenu au fil des mois une thérapie qui ponçait spontanément mes différents mal êtres notamment ceux qui ont un rapport avec ma maladie.

 

 4— Mme Assia BELHOCINE, l’endométriose une maladie peu connue qui ronge beaucoup de femmes en silence comment la vit-on au quotidien ?

C’est une maladie qui altère sévèrement la qualité de vie de la femme ; notamment à cause des douleurs qu’elle engendre. Aujourd’hui je suis navrée de voir ce nombre effarent de jeunes filles qui nous contactent via les réseaux ou via leurs mamans pour nous faire part qu’elles vivent un échec scolaire total à cause de ces douleurs qui les handicapent à longueur d’année. La professionnelle souvent se retrouve freinée dans sa carrière à causes des arrêts de maladie récurrents qu’elle déposent auprès de son employeur ; des difficultés que l’épouse ou la mère à mener la plus simple des tâches quotidiennes à la maison ; sans parler du reste des symptômes encore plus handicapants dont cette maladie est responsable :  asthénie chronique ; fibromyalgie ; problèmes d’ordre digestif ou infection urinaires répétitives ; et ce ;  lorsque la maladie atteint  d’autres organes que ceux de l’utérus les ovaires ou les trompes ; sans parler bien sûr du retard d’infertilité dont 30 à 40 pour cent de ces femmes atteintes de la maladie vivent sans pouvoir trouver solutions à ce problème. Il ne faut pas oublier de citer les conséquences que cause cette maladie dans la vie intime (sexuelle) du couple dont l’endométriose est responsable ; celle-ci provoquant chez certaines des dyspareunies qui nécessitent une réelle prise en charge ; mais hélas la femme a pris ce pli comportemental de rester muette sur ce sujet demeurant dans son isolement à subir un mal qui au final peut avoir une solution thérapeutique.

C’est une réelle souffrance qu’est cette maladie ; surtout lorsqu’aucune prise en charge ne leur est offerte que ce soit sur le plan médical ou psychologique ; la maladie causant chez certaines ; notons-le ; de sévères dépressions.

 

 5—Vous avez une fille aujourd’hui âgée de neuf ans un don de Dieu, Comment avez-vous vécu votre grossesse miracle si l’on peut appeler ça ainsi ? 

Ma fille est un miracle de dieu ! oui !  après dix ans d’infertilité et au passage ayant subis de multiples actes chirurgicaux qui m’ont épuisé physiquement et moralement ainsi qu’une insémination artificielle échouée. Lorsqu’on m’annonça ma grossesse neuf mois après l’échec de la tentative de procréation artificielle; je dois avouer que j’étais partagée entre la joie et la peur ; UN parce que j’étais tombée enceinte à un âge ou la grossesse était un peu risquée; surtout ayant comme antécédents médicaux et chirurgicaux totalement fébriles ; DEUX  parce que j’avais peur que ce miracle soit éphémère ; et trois ; j’avais à l’époque décidée de m’inscrire à un Mini MBA pour me lancer dans une carrière en RH assez solide. 

A ce tableau je souris ; car parfois l’humain est mis face à des choix qui au final ne lui facilitent guère la tâche dans la prise décision ; et que quel que soit le choix que vous faites ; il y a forcément quelque chose à faire sacrifier ; et je pense avoir pris la bonne décision de me consacrer à ma grossesse et de la préserver en y mettant tous les moyens indispensables pour.  

Mme Assia BELHOCINE / crédit photos studio le Perse

6— Vous avez créé une association -ENDO ALGERIE- afin de sensibiliser et parler de cette maladie peu connue hélas, quel message adressiez-vous aux femmes ?

Cette association est née pour donner une voix à toutes ces jeunes filles et ces femmes pour parler sans tabous de cette maladie. Il est très important pour la femme ; vivant dans une société comme la nôtre ; ou les sujets qui ont un rapport avec l’intimité de la femme demeure encore tabous. Il est important de commencer à instaurer une nouvelle trajectoire d’échange et de dialogue ; surtout lorsqu’il s’agit de santé. Voyez-vous ; il y a quelques années de cela on n’osait pas parler du cancer du sein ; aujourd’hui les choses ont évolué ; les mentalités ont un peu muri ; ce qui permet à la femme d’affronter sa maladie avec un esprit saint non pollué et fort. La femme a un rôle plus qu’important dans la société hormis celui de procréer ou de s’occuper de son foyer ; elle a aujourd’hui une place socioéconomique qui fait qu’elle se retrouve positionnée à une échelle un peu plus émancipée lui donnant un des rôles importants. 

 

 7— Quel est l’impact de l’association aujourd’hui vis-à-vis des femmes dans leurs milieux professionnel et sociétal ? 

  En effet ; ENDO ALGERIE a entamé récemment et « urgemment" ses actions de sensibilisation en milieu professionnel. L'endométriose est une maladie féminine INVALIDANTE et INVISIBLE qui reste malheureusement encore peu connue auprès du grand public ; même si elle est de plus en plus reconnue et identifiée par le corps médical mais dont les conséquences restent encore insuffisamment prises en compte dans la sphère professionnelle. De mon point de vue, le sujet de l’impact de l'endométriose au travail reste encore trop peu abordé ; si ce n’est presque pas. Les conséquences de l'endométriose sur la vie professionnelle des femmes qui en souffrent sont majeures affectant sensiblement le quotidien au travail et donc leur carrière.
 
 
1) DES SYMPTÔMES HANDICAPANTS AU TRAVAIL OCCASIONNANT UNE DIMINUTION AVÉRÉE DE LA PRODUCTIVITÉ : les douleurs occasionnées par la maladie ont des conséquences sur leur capacité à rester debout, assises ou à garder une certaine position en plus des fatigues chroniques. Très peu de données sont disponibles en Algérie concernant les arrêts de travail liés à l'endométriose ; d’où la nécessité par exemple de mettre en place une plateforme en ligne au niveau des entreprises afin de récolter des statistiques exploitables dans le cadre de la stratégie qui se rapportant à la prise en charge et le suivi du parcours de soin de la malade.
 
 
2) DES CONSÉQUENCES FINANCIÈRES ET PROFESSIONNELLES POUR CES FEMMES: L'endométriose entraîne également des conséquences financières et sur le long terme ; des conséquences sur leur trajectoire et leur carrière professionnelles. Depuis la création d’Endo Algérie ; nous avons rencontré des femmes qui ; pour certaines nous ont fait l’aveu qu’elles ont dû renoncer à leur statut ou à leur métier pour s'adapter à leur maladie. Il existe un réel risque de précarisation qui n'est pas évalué aujourd’hui. D'autres nous ont aussi confié qu’elles se retrouvent souvent en position de non crédibilité due aux dépôts récurrents des arrêts de maladie à cause des douleurs invalidantes .
 Endo Algérie; a depuis un moment mis en route les actions de sensibilisation en milieu professionnel ; afin de mettre l’accent sur la nécessité de la prise en compte par l'employeur de cette maladie et qui est quasiment inexistante ;  un état de fait dû à plusieurs raisons :
 la non-formation des professionnels de santé, au premier rang desquels les médecins du travail, l'absence de culture bienveillante dans l'entreprise ou la collectivité publique à l'égard des femmes atteintes, les faibles sensibilisation et information des employeurs quant à cette question de santé publique majeure. 

 
ENDO ALGERIE a été plus que ravie ; et ce lors des quelques actions de sensibilisation menées en milieu professionnel ; notamment celle menée au niveau de la BNP Paribas El Djazair de constater que cette dernière a démontré une réelle volonté quant à un vrai dialogue social prometteur pour toutes les malades.

 

 8 — Qu’est-ce qui vous émeut chez une femme aujourd’hui ?

Sa voix qui porte ! Son corps que l’on voit vibre à vue d’œil ; et ce ; malgré ses souffrances ; ses solitudes ; ses blessures ; ses rêves échus ; je suis toujours ravie de voir ces femmes se dresser tel un robuste monument contre vents et marée ; malgré la fragilité de leur vécu ; créant devant elle des horizons grandioses à l’infini ; même si cela relève parfois de l’impossible ;

 

9— En tant que femme HORA, Mme Assia BELHOCINE, Quel message vous avez à transmettre Aux lectrices et lecteurs de HORA magazine. ?

L’Algérienne est une guerrière et une grande battante ; elle œuvre avec un courage inépuisable dans son foyer ; dans sa profession ; dans son couple ; avec ses enfants ; le tout dans une société qui souvent ; n’offre pas trop les conditions pour vivre une citoyenneté limpide ; mais J’ai foi en le pouvoir du travail et ou l’effort collectif ; qu’il soit moral ; mental intellectuel ou autre ; peu importe sa nature. J’ai foi en le pouvoir qui nait de cette force qui regroupe multiples énergies ; parfois qui naissent l’une à l’insu de l’autre ; mais qui finissent inéluctablement par se rencontrer pour un avenir non forcément meilleur mais tout juste à l’écoute de ce qui pourrait nourrir cette force conjuguée au féminin et au masculin aussi ; pourquoi pas ! ce serait l’idéal d’ailleurs. Il m’a fallu bien des années pour comprendre que sans souffrances ; nous ne pourrons pas finalement assez mesurer la chance que nous avons ; qu’est la VIE ; et je pense que la réussite réside dans le fait de pouvoir tirer profit et donc leçons de nos souffrances ; car sans elles ; la réussite et donc l’accomplissement ne brilleront d’aucune couleur.   

10- HORA magazine est un magazine qui s’adresse à la femme algérienne et a travers elle les femmes du monde quel message transmettriez-vous a HORA magazine ?

Je suis de ceux qui sont toujours ravis et enchantés de rencontrer des personnes capables de faire passer un message sur cette terre, un message de force, de raison, de créativité, d'amour, d’empathie, de solidarité de persévérance, d’encouragement, d'équité de savoirs faire et être, et ce, quel que soit le moyen, la façon, la méthode, dans le seul but de maintenir en vie ici dans ce bas monde, l'essence même de l'humanité qui n'est autre que celle du cœur et de l'esprit purs et saints. Hora magazine, est un exemple vivant de tout cela, un magazine qui résume diverses batailles féminines menées parfois durant de longues années à l'insu du monde, un magazine qui permet au contraire de faire briller la lumière du beau du bien de l'exceptionnel et pourquoi pas de l'excellence, un message qui dit tout haut que tout est inébranlable lorsque forces et savoirs s'unissent. Longue vie à hora magazine et à toutes les horates du monde

 

Merci de nous avoir invités à réaliser cette belle interview

Longue vie a l’association ENDO-ALGERIE 

 

HORA magazine /MAI 2024

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