Dzair Zaman/ Alger d’antan
L’approche du mois sacré du Ramadhan

Dzair Zaman/ Alger d’antan, à l’approche de ce mois sacré du Ramadhan, la Casbah bouillonnait. « Ramadan arrive ! » claironne-t-on un mois auparavant dans les rues de la Casbah. C’est normal, car, le ramadan, était dépeint, dans toutes les bouches, comme un invité de marque.
Pour les… Ménagères, c’était l’occasion de faire le grand nettoyage.
Elles savonnaient les murs, bichonnaient les cuivres et la grande vaisselle. De même, elles attachaient du raphia au bout d’un manche à balai pour enlever la poussière et les toiles d’araignées enfouies dans les « ghourfates ». L’extérieur n’était pas délaissé pour autant. Avec de la chaux, provenant du sud algérien, les hommes enduisaient les murs anciens de leurs maisons. Quant à la chaux extraite de la Carrière Jaubert, elle servait à blanchir les terrasses et l’extérieur des {douérettes}. On y ajoutait de la poudre d’alun et des morceaux de figues de barbaries. Un enduit qui résiste aux intempéries.
De plus, riches et pauvres, s’attelaient à s’approvisionner en denrées alimentaires non-périssables afin de constituer des réserves importantes. À cette époque, on mangeait ce qu’on avait pu stocker. Aux souks ou chez l’épicier du coin, le mot « makache » n’avait point sa place. Les commerçants affirmaient « hadar » et veillaient à maintenir les prix alimentaires stables. Le voilà de nouveau ! Toute la Casbah le célébrait avec faste. En ce temps, les lampes électriques n’existaient pas.

On éclairait les maisons et les rues avec des lampes à huile. Pas de téléphone portable, pas de radio ni de télévision, les habitants de la Casbah avaient un procédé astucieux pour connaître avec exactitude l’heure du ftour. Ils se mettaient aux terrasses des maisons pour apercevoir l’imam de la Grande Mosquée. Celui-ci hissait deux drapeaux en haut du minaret. Le drapeau blanc annonçait l’approche de l’heure du ftour. Quelques minutes après, il le fit descendre pour hisser le drapeau vert annonçant officiellement la rupture du jeûne. Cette pratique a disparu durant les années 40 pour céder la place au coup de canon !

L’une des particularités de La Casbah, c’est cette vie sociale riche et pleine de finesse qui emplissait les basses maisons blanches de la médina, où les femmes avaient un rôle fondamental dans la transmission des traditions. La boqala, les habits traditionnels, le rituel de la jeune mariée au hammam, les fameux artisans qui exposaient leur travail dans les venelles de la cité, les cafés D'iwan et le mythique Sidi Abderrahmane, font que ce lieu est un symbole de la culture algéroise.

Les terrasses, lieu de rencontre des femmes, séparées par un simple muret, étaient animées juste après la prière de l'après-midi. Des maisons de la vieille ville en étages avec une vue superbe vue sur la baie d'Alger, l’on admirait la mer et les bateaux. Cet espace était propice aux jeunes filles pour côtoyer leurs aînées, pour apprendre la couture, la broderie, le tricot, etc. Parler de La Casbah, c'est évoquer les longues soirées de Ramadhan entre femmes, entourées d'enfants, petits-enfants, attentifs aux M'hadjiatte (contes) de Djeha, au jeu de Boqalate (devinettes). Boualem Titiche célébrait à sa manière la veillée du 27ᵉ jour de Ramadhan. Il remontait en jouant de la zorna de la Grande mosquée à la place des Martyrs jusqu'au mausolée de Sidi Abderrahmane, la foule qui l'accompagnait grandissait à mesure qu'il avançait. La Casbah d’Alger il y avait des circoncisions des petits enfants aussi à la veillée du 27 jours du ramadan (laeleth el kadr)

Ya hasra ya blad sidi Abderahmanne / ya hasra ya mahrousa
Ou les femmes embellissaient tes rues et tes terrasses parfumées de jasmins et d’encens
Ou le chaabi retentissait à travers tes ruelles yel Mahrousa yel Bahdja yel kasba laaziza
HORA magazine / Art & Culture. Février 2025